Sur fond d’incompréhensions mutuelles et parfois d’aigreurs,
les préjugés véhiculés au Sénégal visant les Sénégalais de l’étranger, sont
nombreux et bien ancrés ! Nous partageons ci-dessous quelques aprioris les plus
courants et autres contre-vérités qu’il est temps de signaler en vue de
relations apaisées…
1.
« Ils sont à peine deux millions et vivent principalement en France et en
Europe »
FAUX ! Les statistiques officielles font état d’à peine deux
millions de Sénégalais de l’étranger mais se basent avant tout sur le nombre
d’inscrits dans les consulats. Or, selon les pays, entre 10 et 90 % des
Sénégalais ne sont pas immatriculés. C’est particulièrement le cas de ceux des
2ème et 3ème générations, des enfants de parents mixtes, des sans-papiers… Et
en Afrique où se concentre plus de 70% de la diaspora ! Contrairement aux
Maliens ou Ivoiriens, les Sénégalais ne se sont pas fixés exclusivement dans
les pays francophones (France, Belgique, Canada, Mali, Gabon, Maroc…) ! A
l’affût des opportunités là où elles se trouvent, les sénégalais sont installés
dans une soixantaine de pays (USA, Italie, Espagne, Gambie…) et parmi les
destinations les plus « exotiques » : Finlande, Suède, Russie, Australie, Chine…
2.
« Ils sont principalement Mourides ou Peuls ! »
FAUX ! Si les « Mourides », commerçants par nature, sont
fortement implantés dans les grandes métropoles (Paris, New-York, Milan…) et
leur contribution aux transferts financiers et œuvres philanthropiques est
substantielle, la diaspora sénégalaise rassemble avec le temps toutes les
régions, ethnies et confréries qui constituent le socle humain et la richesse
du Sénégal. Historiquement, les premiers à avoir émigré vers l’Europe sont les
mandjaques, soninkés et peuls avant d’être rejoints plus tard par les wolofs et
autres (sérères, malinkés…). Et cette diversité est aujourd’hui bien visible
au travers des nombreuses associations de la diaspora.
3.
« A part quelques success stories, ils sont chômeurs ou vendeurs de rue »
FAUX ! Comme au Sénégal, on trouve aussi bien des demandeurs
d’emplois que des multimillionnaires. Dans la communauté à l’étranger, on
recense dix groupes sociaux différents, de l’étudiant à l’homme d’affaires en
passant par le sans-papier et le footballeur professionnel. Historiquement, les
ouvriers et employés représentent encore 70 % de la communauté, mais ce chiffre
tend à baisser avec l’influence de la 2ème génération beaucoup plus qualifiée
et des étudiants. Dans certains pays (USA, Canada, UK …), les cadres sont même
majoritaires. A contrario, la communauté la plus précaire socialement (ouvriers,
employés, sans emplois, commerçants informels…) se trouve en Italie et en
Afrique.
4.
« Ils sont trop occidentalisés ! »
FAUX ! Toutes les études et observations sur la diaspora
sénégalaise en Europe montrent au contraire un attachement fort au patrimoine
culturel d’origine et aux traditions. Pour preuve, les trop rares
manifestations culturelles sénégalaises organisées en Europe ou aux USA sont
prises d’assaut. Idem pour les fêtes religieuses et autres pèlerinages au
Sénégal ! En revanche, il est vrai qu’il y a une attention particulière à
porter aux 2eme et 3eme générations (qui représentent selon les pays de 20 à
40% de la communauté). Sur le modèle d’autres pays (Malte, Ghana, Liban…),
l’Etat du Sénégal doit développer de nouvelles offres en tourisme mémoriel
(excursions, apprentissage du dialecte, transmission du patrimoine culinaire…)
destinées à satisfaire les nombreux besoins identitaires de ces jeunes et de
leurs parents.
5.
« À part aider leur famille, ils n’apportent pas grand-chose au pays ! »
FAUX ! Il est vrai que les Sénégalais de l’étranger sont
d’abord solidaires de leurs familles à qui ils envoient plus de 2 milliards
d’euros par an. Mais ce n’est pas tout ! À cette manne, il faut prendre en
compte les sommes dépensées pendant les vacances passées au pays, une grande
part du chiffre d’affaires de certaines grandes sociétés publiques et privées
(banques, assurances, opérateurs télécoms, compagnie aérienne, immobilier,
professionnels de la santé…), les entreprises créées au Sénégal par la diaspora
et les produits sénégalais consommés à l’étranger par la communauté
(agroalimentaire, artisanat, textile…) Les Sénégalais de l’extérieur ont montré
avec le temps qu’ils étaient un partenaire stratégique et fiable pour le
développement économique et humain du Sénégal. Aujourd’hui, s’Ils mènent
relativement peu de projets au pays, c’est qu’ils n’en ont pas tous les moyens
et/ou manquent d’idées et de garanties ! A l’Etat sénégalais de s’employer à
rendre toutes les conditions favorables et fertiles à ces nombreux fruits de la
diaspora : investissements, compétences, épargne, soutien à l’export,
engagement citoyen, développement humain et culturel, tourisme, philanthropie,
réseaux influence… ?
6.
« Ils sont déphasés par rapport aux réalités du pays… ils se croient supérieurs
! »
FAUX ! Ils sont les premiers soutiens financiers de leur
famille restée au pays avec qui ils sont en contact quasi quotidiennement via
les réseaux sociaux et WhatsApp. Ils sont par ailleurs très connectés aux
médias nationaux via internet. S’ils sont bien imprégnés des réalités
économiques et sociales autour de leur famille et de la communauté d’origine,
certains font montre parfois d’un manque de diplomatie dans leurs contributions
citoyennes sur les réseaux sociaux et autres. Ce qui peut être perçu au pays
comme de la condescendance est au fond une marque de leur engagement
patriotique et leur impatience à accélérer les changements. Qu’on se le dise,
les Sénégalais de la diaspora ne veulent plus être considérés seulement pour
leur argent !
7.
« Ils sont trop radicaux et ne veulent pas le bien du Sénégal »
FAUX ! Les Sénégalais qui vivent dans des démocraties
d’Europe et d’Amérique sont habitués à un haut niveau de liberté d’expression.
Par l’importance de leurs transferts financiers synonymes de sacrifices pour
beaucoup d’entre eux, ils contribuent substantiellement à la stabilisation du
Sénégal et aspirent en retour à la reconnaissance de leur droit d’opinion
critique ! Au fond, ils se sentent très liés au pays d’origine et
s’impatientent de voir celui-ci, accélérer sur le plan économique et humain
pour le bien de leurs familles… et aussi créer les conditions favorables à leur
rêve collectif : retourner définitivement au Sénégal pour y monter un projet.
8.
« Ils ne viennent qu’en été »
FAUX ! L’été et le « Tabaski » représentent moins de 50 % des
flux d’entrées annuels des Sénégalais de l’étranger. C’est une réalité ! A
l’occasion des fêtes de fin d’année, des grands pèlerinages (Magal…), la
diaspora est massivement présente au pays. Etant donné que 90% de la diaspora
est localisée en Europe et dans le voisinage en Afrique donc à moins de 5
heures d’avion du Sénégal, ils se rendent au pays tout au long de l’année
et…rentreraient davantage si les prix des billets d’avion étaient moins chers.
09.
« Les jeunes ne se considèrent plus comme sénégalais ! »
FAUX ! En France et dans les pays historiques d’immigration,
environ 40% de la communauté n’est pas née au Sénégal et parmi ces jeunes on
trouve souvent les meilleurs ambassadeurs du Sénégal. Plus qualifiés et mieux
insérés, dans leur grande majorité, ils aspirent à servir différemment le pays
d’origine. Encore faut-il le comprendre ! Et dans cette voie, il appartient à
l’Etat sénégalais de les aider à cultiver davantage leur identité sénégalaise
ce qui ne doit pas se limiter aux cours de wolof.
10. « Quand ils
rentrent chez eux, ils nous oublient ! »
FAUX ! Une fois retournés
chez eux, les Sénégalais de l’étranger maintiennent le contact avec leur
famille et le pays. Pour preuve, en France, Espagne et en Italie, le Sénégal
figure dans les premières destinations pour les télécoms et les transferts
d’argent. Les médias sénégalais sont très suivis, particulièrement sur le Web.
Les produits sénégalais (alimentaires, artisanat…) achetés à l’étranger le sont
très majoritairement par la diaspora. Et les artistes sénégalais qui se
produisent à l’étranger font salle comble…