Dans une correspondance en date du 26 mars 2020, adressée à l’infirmière chef du poste de santé de Raffenel, avec ampliation au médecin chef du district sud et au sous-préfet, le maire de Dakar-Plateau, Alioune Ndoye, décide de fermer, en pleine crise sanitaire liée à la pandémie de Coronavirus, la maternité dudit poste de santé. Ce à quoi s’oppose, en sa qualité de notable dans la commune, le président de l’Entente des mouvements et associations de développement (EMAD), Abdou Khadre Gaye. Nous vous proposons l’intégralité de sa déclaration.

«Je ne veux pas réagir aux décisions du maire de Dakar-Plateau. Je préfère observer et me taire. J’en ai ainsi décidé depuis quelques années déjà. Par décence. Mais là, j’y suis obligé. En effet, lorsqu’en pleine crise sanitaire, au moment où l’État mobilise toutes les forces vives de la nation et où les populations en situation de détresse attendent toujours l’assistance de la commune, il décide arbitrairement avec des prétextes fallacieux la fermeture de la maternité du poste de santé de Raffenel, ouverte en avril 2017 avec l’accord de l’autorité sanitaire, qui fonctionne bien grâce à Dieu et l’engagement des agents, sans incident ni accident, à la satisfaction des populations, surtout celles des quartiers défavorisés abandonnées à leur sort, je lui conseille d’arrêter.

Je lui conseille d’arrêter. Parce que ce n’est pas son rôle. Et la situation ne s’y prête guère, même s’il avait raison. Or, il a tort. L’heure est grave. Le peuple sénégalais et toute la communauté internationale, debout comme un seul homme, fait face à un avenir plein de menaces. L’État du Sénégal a décrété l’état d’urgence assorti d’un couvre-feu. L’armée installe des hôpitaux de campagne. On réquisitionne des hôtels pour abriter les personnes contacts. On craint le débordement des hôpitaux et on renforce le stock de denrées alimentaires en prévision du pire (Dieu nous en préserve). On réfléchit qui mieux mieux sur comment protéger avec plus d’efficacité les populations surtout les plus vulnérables, en leur offrant les commodités usuelles…

À un moment aussi critique, où la mairie devrait enfin songer à équiper adéquatement la maternité de proximité de Raffenel, décider sa fermeture sous le faux prétexte qu’un poste de santé ne doit pas en abriter est un précédent grave et dangereux. Car, un poste de santé peut bel et bien abriter une maternité. Dire le contraire, c’est faire preuve d’une double ignorance : celle des dispositions pratiques régissant le fonctionnement des structures sanitaires et celle du déficit saisonnier en lits d’accouchement, même à Dakar.

La preuve, le poste de santé de Gorée et beaucoup d’autres sur toute l’étendue du territoire national en abritent et procèdent à des accouchements simples pour désengorger les hôpitaux et centres de santé comme ils le doivent, au même titre que le poste de santé de Raffenel. Je lui conseille donc d’arrêter cette dérive et de songer plutôt à mettre les structures de santé du Plateau dans les meilleures conditions d’exercice de leur mission. Et je demande au médecin chef du district sud, qui a autorisé l’ouverture de la maternité et qui est seul habilité à décider sa fermeture ou non, de ne pas laisser faire et de songer uniquement aux populations et à leur bien-être.

Pour finir, permettez-moi de rappeler au maire l’urgente interpellation à lui adressée par des conseillers municipaux de la commune de Dakar Plateau qui, à l’instar de beaucoup d’autres, se sentent exclus de la gestion municipale. En effet, lors d’une conférence de presse tenue le 26 mars 2020, les conseillers Pape Diouf de  Taxawu Dakar, Yandé Diop du PDS, Baba Touré de la CPJE, Assane Bissichi du PVD et Ndèye Thiam Samb de l’APR l’ont interpellé sur sa passiveté face à la pandémie. Ils lui ont aussi demandé de convoquer une session extraordinaire du conseil municipal et/ou d’ouvrir des concertations et lui ont fait des propositions, assez pertinentes du reste, inspirées de celles faites par son collègue, Barthelemy Dias, maire de Mermoz/Sacré-Cœur, que je félicite et encourage pour sa proactivité.

À cette occasion, ils ont rappelé que Dakar Plateau, une commune de quelque trente mille habitants, qui reçoit plus d’un million de personne par jour, doit être surveillé de très près. Et là, me semble-t-il, se situe l’urgence. Je lui conseille donc de faire preuve d’humilité, de courage et de répondre à la requête des conseillers municipaux en vue d’une approche transparente, participative, inclusive et fondée sur la justice sociale pour parler comme Moussa Ndiaye, ex secrétaire municipal de la commune du Plateau. Car l’heure, comme indiqué par le président de la République et son ministre de la santé, est à la concertation, à la mobilisation et au travail pour vaincre le Covid-19».