Haut fonctionnaire passé par le ministère de la Santé et l’Élysée, élu local, Jean Castex est un homme aux réseaux multiples. Emmanuel Macron lui a confié la lourde tâche de préparer le plan de déconfinement qui doit être présenté dans quelques jours par le gouvernement.Il est le « Monsieur déconfinement » du gouvernement français. Jean Castex, 54 ans, a été chargé par le président Emmanuel Macron et le Premier ministre, Édouard Philippe, d’élaborer la stratégie de sortie du confinement qui dure depuis le 17 mars pour enrayer la propagation du Covid-19. Le 2 avril, lors de l’annonce de sa nomination, Édouard Philippe a loué « un haut fonctionnaire qui connaît parfaitement le monde de la santé et qui est redoutable d’efficacité ». Jean Castex a la charge de résoudre le casse-tête du déconfinement progressif de la population française dans un contexte où le nouveau coronavirus n’aura pas totalement disparu. Un défi qui ne fait pas peur à cet énarque, habitué des dossiers complexes, qui peut s’appuyer sur une vie professionnelle et politique très largement orientée vers le secteur social et la santé.

« Idées claires et franc-parler »

Sorti en 1991 de l’ENA, admis à la Cour des comptes, Jean Castex fait le choix d’un poste de directeur des affaires sanitaires et sociales dans le Var. Puis il rejoint la préfecture locale avant de devenir, en 2005-2006, directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins au ministère des Solidarités et de la Cohésion sociale. C’est là qu’il va être repéré par Xavier Bertrand, qui en fera son directeur de cabinet à deux reprises, d’abord au ministère de la Santé (2006-2007) puis au Travail (2007-2008). « Lors du premier plan pandémie (pour le virus H5N1 en 2006, NDLR), c’est Jean Castex qui est dircab », rappelle Xavier Bertrand, à l’AFP, en soulignant que « l’OMS avait alors indiqué qu’on était un des pays les mieux préparés au monde ». « Le côté ‘je vous mets en place un plan qui ne fonctionne pas sur le terrain’, ce n’est vraiment pas le genre de la maison Castex », ajoute le président de la région Hauts-de-France, en louant « les idées claires et le franc-parler » de cet « énarque rectifié élu local ».

Un parcours politique à droite

« Politiquement, je suis de droite et je l’assume parfaitement », aimait souligner Jean Castex à l’époque, selon l’AFP. Membre du parti Les Républicains, il est notamment proche de Nicolas Sarkozy dont il a été le secrétaire général adjoint à l’Élysée. Ce qui ne l’empêche pas de soutenir la candidature de François Fillon pour la présidence de l’UMP lors du congrès de l’automne 2012. Il sait aussi se ménager des appuis à La République en marche : son nom avait un temps circulé, fin 2018, pour remplacer Gérard Collomb au ministère de l’Intérieur avant que l’ex-socialiste Christophe Castaner lui soit préféré. Jusqu’à sa nomination le 2 avril, il était également délégué interministériel aux Jeux olympiques de Paris-2024 et aux grands événements sportifs, et présidait l’Agence nationale du sport.

Un élu au contact

Ce haut fonctionnaire sait aussi conserver un attachement local. Ce père de quatre filles a conservé l’accent du sud et reste très attaché à son Gers natal. Il est depuis 2008 maire de Prades, où il a d’ailleurs été très largement réélu avec 76 % des suffrages lors du premier tour des municipales, 48 heures avant le confinement. Il a également été conseiller régional de Languedoc-Roussillon de 2010 à 2015 et s’était présenté à la députation lors des législatives de 2012, lors desquelles il avait été battu par la candidate PS, Ségolène Neuville. En lui donnant « le pouls du pays », cet ancrage territorial pourrait s’avérer un « atout maître » pour préparer le déconfinement, estime Franck Louvrier, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, interrogé par l’AFP : « C’est précieux » car il faudra « emporter l’adhésion de tous ceux qui décident localement ». Les élus locaux qui, selon BFMTV, sont au cœur des consultations de Jean Castex sur le déconfinement. Il a ainsi reçu une contribution de l’Association des maires de France (AMF), qui réclame que le futur dispositif soit « cadré nationalement mais adaptable jusqu’à l’échelon le plus local ».

« Il saura dire les choses à l’Exécutif »

« Il savait dire les choses à Nicolas Sarkozy », raconte un témoin, cité par RTL. « S’il doit dire à Emmanuel Macron ou Édouard Philippe que là, ça ne va pas, il saura aussi le faire. » De quoi tendre les relations avec les deux têtes de l’exécutif ? « Ce n’est pas une boîte aux lettres, Castex, il a vocation à donner son avis », indique un proche du Premier ministre. « Il est très intégré aux équipes de Matignon », explique l’entourage d’Emmanuel Macron, interrogé par BFM TV, qui souligne que si les arbitrages définitifs seront bien entre les mains du chef de l’État et d’Édouard Philippe, « Jean Castex est consulté ». Un rôle clé qui fait des jaloux dans les ministères, selon RTL. Un conseiller anonyme persifle ainsi : « Méfiez-vous, Jean-Paul Delevoye était bien un grand spécialiste des retraites ! » Xavier Bertrand, lui, rappelle que son ancien protégé n’a pas forcément toutes les cartes en main. Jean Castex « n’arrivera pas avec une solution miracle tout de suite », avertit-il, car « tout le monde a compris que les conditions de sortie du confinement seraient aussi fonction du nombre de masques et des tests ».