S’il dresse un bilan élogieux de sept ans à la tête de la Ville de Guédiawaye, ce n’est pas parce qu’Aliou Sall est un maire repu. Bien au contraire, il nourrit beaucoup d’ambitions pour la localité qu’il dirige, dont il parle avec passion et sincérité. Avec lui, Guédiawaye devrait, selon son souhait, se débarrasser des oripeaux de ville-dortoir, pour porter le bleu de chauffe des laboratoires de recherche, et même le costume cravate du séminariste à la recherche d’un cadre pour ses rencontres. Dans un entretien accordé au journal Le Quotidien, l’édile de Guédiawaye décline sa vision, se prononce sur la manière dont il prépare les prochaines élections locales et le retour annoncé du poste de Premier ministre.
Vous avez tellement de casquettes, mais on va
prendre celle de maire !
Surtout en ce moment-ci, je préfère de loin la casquette de maire. Bien que, à
bien voir, je n’en ai pas beaucoup, de casquettes !
Président de l’Ams, l’Uael,
l’Adm…*
Je ne suis pas président de l’Uael.
Non, vous l’avez été, vous
aviez promis de laisser tomber, avant de faire volte-face…
Non, ce n’est pas cela qui s’est passé. En vérité, de manière statutaire, le
président de l’Ams (Association des maires du Sénégal) alterne, avec le
président de l’Ads, celui des départements, à la tête de l’Uael. Parce que
l’Uael (Union des associations des élus locaux) regroupe l’Ams et l’Ads. Donc,
alternativement, selon les statuts, l’un des présidents dirige pour un an,
avant de céder à l’autre pour un an. A l’époque. Quand c’était mon tour d’être
président de l’Uael, il y a eu ce tollé. J’y ai renoncé volontairement, et
pendant tout mon mandat, je n’ai pas pris le poste de président de l’Uael. Je
suis resté vice-président car, chaque fois que l’un des présidents devient
président de l’Uael, l’autre en devient le vice-président… Donc, l’une des
casquettes part.
(Rire). Il reste celle de l’Ams
Mais le président de l’Ams, il est forcément un maire ! On ne peut pas
prendre quelqu’un d’autre, pour en faire le président de l’Ams !
On aurait pu prendre un autre
maire !
Oui, mais moi, j’étais candidat ! D’ailleurs, je l’avais annoncé dans
votre rédaction. Et les gens avaient semblé surpris à l’époque. Mais, je dois
aussi préciser que c’est une fonction bénévole, non-salariée.
Mais le président de l’Ams a tout de même, disons, un droit de regard sur l’Adm
Oui, parce que selon les statuts de l’Adm (Agence de développement municipal),
le président de l’Ams est président de l’Assemblée générale de l’Adm. Mais ce
n’est pas d’office. En plus, il faut dire que l’Adm n’est pas une agence, c’est
une association créée par l’Etat du Sénégal et l’Association des maires du
Sénégal. C’était sur la recommandation de la Banque mondiale, à l’époque. Les
statuts disent que le président de l’Assemblée générale est le représentant des
élus. Le Directeur général est nommé par le gouvernement. Donc, c’est normal
que le président de l’Ams…
…se retrouve avec des pouvoirs
exorbitants de décisions sur les infrastructures, l’allocation des ressources…
Ce n’est pas tout à fait exact. Pour vous dire que, moi, je suis président de
l’Ag de l’Adm. Je souffre de la lourdeur des dettes de la Ville de Guédiawaye,
à l’égard de l’Adm. Et ce sont des dettes dont je ne peux me dérober. Pourtant,
elles ont été contractées par mes prédécesseurs. Le fait d’être président de
l’Ag de l’Adm ne me soustrait pas de mes obligations de maire. Qui plus est,
aujourd’hui par exemple, je cours derrière l’Adm depuis 2 ans, pour un projet
communautaire, que je ne parviens pas à obtenir. Les mécanismes de
fonctionnement de l’Adm sont tels qu’elle est préservée de toute influence
politique. C’est une agence bien surveillée par les organes de contrôle, la
Banque mondiale, le ministère des Finances, et par les élus, qui sont très
regardants sur la répartition des projets. Ils veulent savoir pourquoi l’Adm a
financé dans telle localité et pas dans telle autre ! Pour vous dire que
ce ne sont pas souvent des privilèges !
C’est néanmoins une bonne
entrée en matière, pour vous demander, puisque vous êtes candidat à votre
réélection, ce que vous présentez comme bilan devant vos électeurs.
(Avec un soupir). Si on devait faire mon bilan, l’interview risquerait de ne
porter que sur ça ! Néanmoins, le bilan concerne plusieurs domaines. A mon
arrivée à la tête de la Ville de Guédiawaye, j’ai eu, pour priorité, le secteur
de l’éducation. L’essentiel de notre effort, notre énergie et nos ressources
financières sont allés vers la jeunesse et l’éducation. Pour vous expliquer
notre action, nous nous sommes simplement inspirés des politiques arrêtées par
l’Etat, à travers le Paquet -le Programme d’amélioration de la qualité de
l’équité et de la transparence- en ayant 3 entrées. La première entrée est
celle de l’accès ; pour permettre à un plus grand nombre d’enfants
d’accéder à l’école, et surtout l’école publique. Pour ce faire, nous avons
travaillé de façon très énergique dans la mise à niveau de salles de classes,
blocs pédagogiques, blocs administratifs, et blocs sanitaires. Nous avons
construit, dans les collèges et lycées, près de 63 salles de classe.
Dans le seul collège Pikine-Est, qui est le seul collège de la commune de
Wakhinane, qui compte pourtant près de 100 mille habitants, nous avons
construit 21 nouvelles salles de classes. Plus un bloc administratif. Au niveau
du collège Ogo Diop, en plus d’avoir réhabilité l’ensemble de l’établissement,
qui était presque en ruines, nous avons construit 6 nouvelles salles de
classes. Au collège Cheikh Anta Mbacké, ex-Canada, nous avons construit 4
salles de classes et sommes en train d’en construire 8 autres. (…).
D’accord, on a compris…
Non, c’est que, souvent, quand on dit que j’ai fait ceci, les gens ont
l’impression que l’on veut les noyer dans les chiffres. Mais moi, je peux vous
dire au détail près, ce que nous avons construit de nouveau, et ce que nous
avons réhabilité dans l’éducation. Et ça, comme je le disais, c’est pour
augmenter la capacité d’accueil dans l’éducation publique. Et pourquoi ?
Guédiawaye compte à peu près 100 mille élèves. Et ce nombre ne tient pas compte
des élèves dans les daaras, ni l’enseignement professionnel. Je compte les
élèves qui sont dans les écoles privées et publiques d’enseignement général,
entre le préscolaire, le primaire, le collège et le lycée, et dans
l’enseignement technique, spécialement au lycée Seydina Limamou Laye. Qui, à
lui seul, compte près de 10 mille élèves sur les 100 mille.
Sur les 100 mille élèves, seuls 35 mille environ, sont dans le public. Donc,
près de 65 mille élèves sont dans le privé, à Guédiawaye ! Une localité
caractérisée, comme toutes les banlieues, par une vie sociale assez difficile,
avec des revenus assez limités pour les familles. Donc, vous comprenez l’enjeu
stratégique d’augmenter la capacité d’accueil du secteur de l’éducation. Qui
plus est, au niveau des résultats, le public arrive loin devant le privé. Notre
objectif est donc d’augmenter les capacités d’accueil du public. C’est notre
bilan, mais ce sont aussi nos perspectives. Notre objectif est d’arriver à
caser 50% d’élèves dans le secteur public, mais aussi de limiter le nombre
d’élèves par classes à 50. Et pour cela, rien que dans les collèges, on doit
construire 75 nouvelles salles de classes, ce qui correspond à peu près à 3
collèges de 25 classes. Et dans le Secondaire, nous devrons construire 125
nouvelles salles de classes, pour pouvoir absorber, dans les 5 prochaines
années, 50% des élèves… et ça, c’est au niveau de l’accueil…
…D’accord, mais au-delà de
l’éducation…
(Rires) Vous voyez, je vous avais dit que mon bilan est long ! Mais je
dois parler de l’éducation, parce que c’est une priorité !
Mais ce n’est pas la seule.
Vous aviez promis, lors de votre passage aux «Marches du Quotidien », des
réalisations sur le plan de la culture. Où en-êtes-vous ?
Il faut que l’on s’entende bien sur ce qu’est la culture. J’ai moi-même dit, il
y a deux ou trois ans, que l’une de mes déceptions, c’était la culture. Parce
que souvent, quand on parle de culture, on parle de musique, folklore. Mais
rarement de théâtre, parfois on oublie la peinture, la littérature, on oublie
toute œuvre de création. Or, la culture est tout aussi éducation. Donc, nous
sommes tout-à-fait fiers d’avoir pu collaborer avec les acteurs culturels, y
compris des acteurs culturels qui ne nous font pas de cadeaux ! Car, si
nous sommes capables de développer des collaborations avec Fou Malade, ou avec
des secteurs du rap, cela veut dire que nous avons été extrêmement ouverts à
accompagner ces gens. Vous ne restez pas deux mois à Guédiawaye, sans avoir un
festival. Notre rôle n’est pas d’organiser la culture, mais d’accompagner les
initiatives culturelles !
Donc, si je ressens un petit regret pour le secteur de la culture, ce n’est pas
par une absence d’actions, mais c’est qu’un de mes objectifs était de
développer l’infrastructure culturelle. Autrement dit, créer des capacités
d’accueil pour tout ce qui est évènementiel. Et nous avons été loin dans ce
projet. Identifier le site, faire le plan, les études, déterminer le budget.
Mais on n’a pas eu de financement, parce que c’est quelque chose de lourd. Il
faut beaucoup de ressources pour créer quelque chose de la dimension du Grand
Théâtre. Et comme pour beaucoup d’autres projets, on a besoin de
l’accompagnement de l’Etat. Malheureusement, l’Etat a ses arbitrages, qui ne
nous ont pas permis, pendant ce mandat, de réaliser «La Salle de Spectacle de Guédiawaye».
Mais nous comptons le réaliser, lors du prochain mandat.
(…) On parle de bilan, donc on ne peut pas occulter la santé. Notre compétence
en matière de santé, ce sont les hôpitaux de niveau 1 et 2. Ici, à Guédiawaye,
nous avons un hôpital de niveau 1, l’hôpital Roi Baudoin. A l’origine, c’était
une maternité. Elle a évolué en district sanitaire, ensuite en hôpital de
niveau 1. Il faut noter que Roi Baudoin est la plus grande maternité du pays,
avec 3500 naissances par an, dont plus de 1000 césariennes. Nous avons
développé un service de télémédecine performant, reconnu par l’ensemble des
professionnels de la santé du pays, y compris par le ministère de la Santé, et
qui est totalement inédit. Une télémédecine appliquée à la santé maternelle et
infantile. Et ça, c’est la Ville de Guédiawaye qui l’a mis en place.
L’une de vos ambitions, en
arrivant à la mairie, avait été de sortir Guédiawaye de ce cadre de
Ville-dortoir.
Je suis sûr qu’aujourd’hui, beaucoup de gens sont attirés par Guédiawaye, pas
seulement pour venir dormir. Mais parce que le cadre s’est beaucoup amélioré.
Tout observateur, qui connaissait Guédiawaye avant, sait qu’il y a eu une
transformation radicale de cette ville. L’environnement est devenu plus
attractif, le cadre de vie n’a plus rien à voir avec ce qu’il y avait avant.
Nous sommes devenus un hub, non seulement pour dormir, mais aussi un hub de
services, avec un nœud de transports qui relie la grande banlieue au
centre-ville de Dakar. Nous sommes devenus un hub de santé, composé de
l’hôpital Dalal Jamm, qui va devenir le plus grand du Sénégal, et Roi Baudoin,
qui est le plus grand hôpital spécialisé en néonatologie et santé maternelle et
infantile. Guédiawaye est aussi un hub de fait, du point de vue de l’éducation,
avec le lycée Limamoulaye qui, je vous le rappelle, compte 10 mille élèves, et
le premier lycée scientifique du pays, dont nous avons démarré la construction,
le lycée des sciences et de technologie.
D’où viennent les ressources
qui vous ont permis de réaliser ce bilan ?
Comme je vous l’ai dit : notre premier partenaire, c’est l’Etat, mais il a
tellement de choses à faire que si vous n’avez pas de propositions, si vous
n’avancez pas dans vos projets, l’Etat ne vient pas vous retrouver. Je vous
donne un exemple concret : on a mis en place la Maison des associations,
c’est juste à côté de la mairie. Ça n’existe nulle part au Sénégal. Vous êtes
journaliste et vous n’avez jamais entendu parler d’une Maison des associations
au Sénégal. Nous l’avons pensée, parce que nous nous sommes inspirés de la
réalité de cette ville, qui fait que la vie associative est une réalité
incontournable. Le nombre d’associations qu’il y a ici, leur dynamisme et
participation dans la vie citoyenne et démocratique, et même dans la vie
économique, sont tels qu’on ne pouvait pas fermer les yeux devant certains de
leurs besoins. Un premier besoin, simple et basique : ils n’ont pas de
locaux. Quand les imams viennent me dire qu’ils n’ont pas de locaux, idem pour
l’Odcav, le Conseil départemental, les Badiénu gox, l’Association des délégués
de quartiers… Appliquant le principe des compétences transférées à la Ville, je
me dois d’imaginer un projet. Je n’ai pas forcément les ressources, mais je le
soumets à l’Etat. Dans le cadre de Promovilles, j’ai choisi de faire des
routes, de l’éclairage, construire une Maison des associations, une Maison de
la femme, le Lycée des sciences. Donc, mon mérite et celui de l’équipe
municipale, ce n’est pas de puiser dans notre poche et de les réaliser, c’est
la capacité d’avoir une vision, de définir des projets. Quand je parle de
projet, je ne parle pas de lignes. Il faut l’argumenter, le chiffrer et définir
son impact dans la vie socioéconomique. C’est ça qui a fait que nous avons
réalisé cette Maison des associations. Nous avons été les premiers à
l’imaginer, en rapport avec des consultants sénégalais, pour réaliser le Pisa,
la Plateforme informatique des services sociaux. Par la suite, d’autres
localités se sont inspirées et l’ont réalisée avant nous, notamment la localité
de Gossas. Je crois que c’est là-bas que ça existe pour le moment. Au Sénégal,
avant 2012, il n’y avait que 8 blocs scientifiques pour les collèges. Le
président de la République, en rapport avec la Banque mondiale, a financé 12
blocs scientifiques. Quand j’ai interpellé le ministre, il m’a dit que
l’arbitrage a été fait et on ne peut plus revenir en arrière. Pour cette fois,
nous avons puisé sur nos propres ressources pour construire le seul bloc
scientifique au Sénégal, construit par une collectivité territoriale. Donc vous
voyez : c’est une synergie de moyens venant de part et d’autres. Il y a
l’Etat, et parfois de simples bénévoles. Nous avons réalisé beaucoup d’écoles,
selon un concept qui s’appelle Vacances professionnelles Pro-banlieue, qui a
permis de réhabiliter 43 salles de classes. Nous débloquons des fonds pour
pouvoir héberger, à Guédiawaye, une soixantaine de jeunes apprenants qui sont
dans les métiers de génie civil et du bâtiment. Ils sont à G5, Cnqp,
Diamniadio, G15, etc. Ces jeunes, à leur sortie, n’ont même pas de stage. Nous
leur disons : «Venez, on vous donne un établissement à réhabiliter pendant
2 mois.» On les encadre et parfois on demande à une entreprise, qui nous envoie
des ingénieurs. Sur 2 années successives, le génie militaire a accepté de nous
envoyer des techniciens. Une fois, le Service civique national nous a envoyé
des techniciens de bâtiment pour encadrer ces jeunes apprenants, qui
travaillent à côté de l’Association des artisans volontaires de la banlieue.
Quelles sont vos aspirations,
si les populations de Guédiawaye vous accordent un second mandat ?
Nous avions vu grand. Guédiawaye a vu grand.
C’était le slogan de votre
premier mandat
Oui. Guédiawaye part de loin. Nous avons eu la malchance d’avoir eu deux maires
avant moi, qui n’ont pas pu rester longtemps. Aucun de ces deux maires, pendant
ces 10 ou 15 dernières années, n’a pu achever un projet de ville. C’était notre
responsabilité de partir de très loin. Quand on part de très loin et qu’on fait
des pas énormes, il ne faut surtout pas faire l’erreur de penser qu’on est
arrivé. Il nous reste du chemin à faire et c’est celui de la modernisation de
la ville.
Je ne reviens pas sur ce que nous avons dans l’école et la santé. Nous avons
accompagné le sport en réhabilitant totalement, avec l’aide de l’Etat, le stade
Amadou Barry et en construisant un stade flambant neuf, c’est celui de
Ndiarème. Guédiawaye football club (Gfc) est en première division. Depuis très
longtemps, ce n’était plus le cas. Guédiawaye basket académie est en première
division depuis quelques jours. Disso handball club est championne du Sénégal
en femmes et est titulaire de la Coupe du Sénégal. En basket, nous avons un
club en première division. Nous avons plusieurs champions en lutte. Ce qu’il
nous reste à faire, c’est consolider cet esprit de gagne, cette volonté de
gagner dans tous les secteurs, y compris dans le sport. On veut aussi faire de
Guédiawaye, une ville des services, une ville où, pour faire un séminaire, on
pense à venir. Nous avons un cadre de vie qui est en train de s’améliorer et
qui a des atouts que personne d’autre n’a, en tout cas dans la grande
agglomération de Dakar. Nous sommes les seuls à avoir des plages fréquentables.
Nous avons un réseau de transport qui permet à tout individu, venant de
Rufisque,Yeumbeul, Dakar ou Yoff, de venir rapidement à Guédiawaye et rentrer
chez soi grâce à l’autoroute à péage, la Vdn et le Brt. Donc, le Guédiawaye du
prochain mandat, c’est Guédiawaye ville de service, ville référence pour
l’éducation, ville de champions dans le sport, hub médical et ville
événementielle.
Quelle est la responsabilité de
la mairie de Guédiawaye dans le morcellement de la Bande des filaos ?
Depuis que nous sommes arrivés à la tête de la ville, les grands problèmes
s’appelaient : extraction du sable par les charretiers, refuge de
malfaiteurs, avec des agressions, dépotoir d’ordures… C’était ça la bande des
filaos. Nous avons conçu, de façon inclusive, un Plan d’aménagement intégré et
nous avons suivi toutes les procédures légales qui concernent un plan
d’aménagement. Nous l’avons adopté en Conseil municipal à la Ville, avec le
soutien des 5 maires des communes. Nous l’avons soumis à la Commission
régionale d’urbanisme, présidée par le Gouverneur de la région de Dakar. Il a
été validé. Nous l’avons soumis à la Commission régionale domaniale qui l’a
validé. Le ministère de l’Urbanisme et le ministère de l’Environnement l’ont
validé. Par la suite, le ministère de l’Urbanisme a préparé un décret de
déclassement de la bande, en application du plan d’aménagement. La bande est
déclassée, mais le foncier appartient encore à l’Etat. Ça, beaucoup de gens ne
le comprennent pas. Il y a plusieurs étapes dans l’aménagement. D’abord, il y a
le changement de statut, c’était une bande classée et on ne pouvait pas y
accéder. Ensuite, il y a un déclassement et après, il faut un plan de
lotissement, qui va permettre d’implanter la place pour les équipements et
celle pour les habitations. 35% de cette bande sera consacrée aux équipements,
parce que nous en avons besoin. Il n’y a plus de foncier à Guédiawaye.
Aujourd’hui, si vous me donnez un financement pour un lycée, je ne sais pas où
le mettre, si je n’ai pas la bande. Ma salle de spectacle, je n’ai pas où la
mettre si je n’ai pas accès à la bande, etc. Le reste, c’est entre les
habitations et le reboisement. Mais, à ce jour, l’affectation n’est pas encore
faite aux collectivités territoriales. Parce que la Ville a défini le plan
d’aménagement, mais ne va pas être propriétaire exclusive. Parce que, quand on détermine
un espace pour un jardin d’enfants, cela ne peut pas appartenir à la Ville. Ce
n’est pas sa compétence, mais celle de la commune. Donc, on va l’affecter à la
commune qui l’abrite. Quand on dit que c’est pour la police, ce n’est pas la
Ville, ni la commune. Cela va appartenir à l’Etat. Malheureusement, les gens ne
le comprennent pas, ils pensent que nous allons prendre la bande, l’utiliser et
vendre les terrains. A ce jour, c’est déclassé, le plan d’aménagement est
accepté. Les services de l’Urbanisme au niveau national, les Eaux et forêts,
dans le cadre d’un comité national, sont en train, avec le cadastre, de prendre
ce qu’on appelle les coûts-parties, parce que nous avons trouvé là-bas des
occupations, même si ce sont parfois des occupations illégales. Ce sont des
choses dont on tient compte. On tient compte des coûts-parties et sur cette
base, on essaie d’appliquer le Plan d’aménagement. Après, on peut affecter à
chaque entité, Etat du Sénégal, collectivités territoriales, populations,
demandeurs, coopératives, ce qui lui revient.
Sur la bande des filaos, l’Union des magistrats
sénégalais (UMS) a obtenu 4 ha offerts depuis 2018 par le président de la
République. Seulement, le décret de déclassement oblige à réaliser une étude
d’impact environnemental, pas réalisée jusqu’ici. Avez-vous interpellé l’Ums
sur ce manquement ?
Je n’ai pas à interpeller l’Ums. Au contraire, j’ai aidé l’Ums à s’implanter,
parce que ce sont des hauts magistrats, la classe moyenne, pour ne pas dire des
gens aisés. Moi, je veux avoir ici des magistrats, des médecins, des gens qui
ont des revenus, pour créer une mixité sociale. Donc, j’encourage des gens d’un
certain revenu à venir s’installer, de la même façon que je défends des
populations démunies à avoir accès à la bande.
En respectant le droit quand
même…
Je suis d’accord mais moi je n’ai pas donné. Il faut le demander à l’Etat qui a
donné, aux Eaux et forêts. Ce n’est pas moi qui applique l’étude d’impact
environnemental. N’étant pas propriétaire du foncier, rien ne me donne les
compétences pour interpeller qui que ce soit pour une étude d’impact
environnemental. En revanche, quand une entité bénéficie d’un espace, je
l’accompagne à avoir de l’éclairage, des routes, à respecter le cadre de vie…
Comment vous préparez-vous pour
les élections locales du 23 janvier 2022 ?
Depuis 2 mois, je suis quasiment 6 jours sur 7 dans ma mairie et dans ma ville,
parce que je ne prends pas ces élections à la légère. Même si j’ai fait un
bilan avec mon équipe et que je suis à l’aise pour le défendre. Je sais qu’une
élection n’est jamais gagnée d’avance. Il faut présenter le bilan aux gens et
leur dire ce que vous leur proposez demain. Mais au-delà de tout, il faut
qu’ils vous voient, vous sentent. Je suis dans ce train au quotidien. Etre dans
un parti au pouvoir, ce n’est pas facile. Nous avons vécu des investitures très
difficiles, pour choisir les têtes de liste et concevoir ces listes. Cela a
créé beaucoup de frustrations et de mécontentements. Mon devoir en tant que
patron de la coalition dans ce département est d’apaiser tout cela. C’est un
travail hardi. Tous les jours, je suis là au plus tard à midi et je reste
jusqu’à minuit, voire une heure du matin, pour rencontrer les gens, les
notabilités. C’est un vrai travail et c’est comme ça que je prépare les
élections. Pendant le mois de décembre, nous allons, sans dévoiler des secrets,
rencontrer toutes les forces vives de Guédiawaye pour présenter notre bilan et
décliner nos perspectives, parce que la campagne ce sont 15 jours et ce n’est
pas beaucoup de temps. Si tu attends la campagne, tu ne peux pas voir les gens.
Nous sommes sur le terrain. Nous occupons le terrain.
Lors du choix de Lat Diop comme
candidat à Golf Sud, vous avez traité Néné Fatoumata Tall de «khouss ma niap».
Cette déclaration va-t-elle dans le sens de l’apaisement ?
D’abord, je n’ai pas choisi, c’est le président de la République, même si j’ai
très tôt affiché mon soutien à Lat Diop à Golf Sud. La politique est une
affaire de combinaisons. Quoi que l’on puisse dire, Néné Tall et Aliou Sall,
c’est la même famille politique. C’est un accompagnement de très longue date.
Il n’y a pas de militants de Néné Tall et de Aliou Sall. Nous avons été
ensemble à toutes les batailles, nous avons traversé toutes les difficultés et
nous avons gagné ensemble toutes les batailles politiques. Donc elle et moi,
c’est pareil. Mais en face de nous, il y avait Lat Diop. Aujourd’hui Lat est
complètement intégré. On ne peut pas tout prendre et laisser Lat Diop en rade.
Ce ne serait pas rationnel ni le meilleur moyen de rassembler toutes les
forces. Evidemment, Néné Tall a le profil pour diriger la commune de Golf Sud.
Elle mérite même plus que ça. Il y a des gens qui l’aiment bien, son entourage
et tout, les militants que l’on partage n’étaient pas contents. Mais en
politique, les choix sont extrêmement durs. Aujourd’hui, je suis heureux de
constater que non seulement Néné Tall a compris le choix du Président et a
dépassé cette étape de frustration. Elle est complètement engagée avec moi, Lat
Diop et les autres responsables, pour qu’on gagne les élections locales le 23
janvier 2022 d’autant plus qu’elle a accepté et j’en suis très heureux, d’être
ma directrice de campagne.
Vous aurez en face de vous
Ahmed Aïdara…
(Il coupe) J’aurai en face de moi 5 candidats.
Personne ne sort du lot ?
Je ne juge pas mes adversaires. Je les prends tous très au sérieux. Mais je
préfère me concentrer sur ma campagne et celle de Benno bokk yaakaar.
Des membres de la coalition
Yewwi askan wi soupçonnent Malick Gakou d’être en connivence avec le pouvoir.
L’avez-vous approché ?
Franchement, pour dire la vérité, cela fait au moins 6 mois que je n’ai pas vu
ni appelé au téléphone Malick Gakou. Ce n’est pas parce qu’il y a un malaise,
non au contraire. Je le prends comme mon grand frère. On a des relations
fraternelles, correctes, mais c’est mon adversaire politique. Mais ces derniers
mois, je suis concentré sur la nécessité de gagner encore. Donc, je ne peux pas
me concentrer sur ce que pense mon adversaire ou ce qu’il fait. Je pense à ce
que je dois faire pour gagner et non sur les problèmes de mes adversaires.
S’ils ont des difficultés, ce sont leurs problèmes. Malick Gakou, depuis qu’il
n’est plus dans la coalition et a créé son parti, je le considère comme un
membre de l’opposition. La preuve, il a même tenté de présenter sa candidature
à la Présidentielle de 2019. Donc, c’est un adversaire politique. Mais je ne
considère pas l’adversité politique comme une bataille d’ennemis. C’est
pourquoi je fais toujours des efforts d’entretenir des relations correctes et
même régulières avec des adversaires. Sinon, c’est la catastrophe : si on
est tous de Guédiawaye et qu’on ne sait pas se parler… Quand Balla Gaye doit
aller lutter et qu’il doit y avoir une mobilisation départementale, vous ne
pouvez pas imaginer toutes les forces qui doivent aller ensemble. En ce moment,
on ne voit plus de Malick Gakou ou Aliou Sall. C’est avec toute cette jonction
que nous le soutenons. Je parle de Balla Gaye, mais c’est valable quand c’est
Gfc qui joue. Donc nous sommes obligés de travailler ensemble sur des sujets
précis, mais nous sommes des adversaires politiques. Je souhaite, comme j’ai eu
toujours à le dire, qu’il rejoigne la majorité, parce que sa place n’est pas
dans l’opposition. Il faut qu’on se dise la vérité, ce n’est pas son style.
J’étais meurtri quand je l’ai vu dans une manifestation courir avec des
bambins. Malick Gakou mérite mieux que ça. Il a des choses à offrir à son pays
et je pense qu’il doit venir. Je suis sûr qu’il serait plus à l’aise avec nous
qu’avec certains radicaux qui veulent mettre le pays à feu.
Qui sont-ils ?
Vous les connaissez, je n’ai pas besoin de les citer.
Craignez-vous que la campagne à
venir soit émaillée de violences ?
En tout cas nous, notre mot d’ordre est que chaque fois, dans un endroit où on
nous annonce la présence d’un adversaire, on va éviter d’y aller. On va éviter
de faire des manifestations devant les domiciles de nos adversaires.
C’est valable pour Guédiawaye
ou partout ?
Je parle de Guédiawaye. Quand il y a un évènement non politique, si j’apprends
la présence d’un adversaire, je vais attendre qu’il parte pour me rendre
là-bas. La violence ne m’arrange parce que je pense que je suis majoritaire.
Donc, je ne veux pas de violence, je ne l’incite pas et je dis à tous ceux qui
m’aiment et sont avec moi vraiment de ne pas répondre aux provocations, ni aux
insultes, aux attaques, même physiques. Il faut faire le poltron parce que
nous, c’est la paix qui nous arrange.
Donc vous allez signer la
charte de non-violence ?
Absolument !
Le Président Macky Sall engage
la coalition Benno bokk yaakaar à signer cette charte…
Je n’ai même pas suivi la déclaration du Président mais ça ne m’étonne pas.
Quand des gens qui ne sont pas politiques disent vouloir une charte de
non-violence, c’est tellement évident que tous les acteurs doivent signer ça.
Un avis contraire est irrationnel.
Ousmane Sonko a dit qu’il ne va
pas signer cette charte ?
C’est son problème !
Pour l’opposition, c’est le
pouvoir qui exerce la violence
Les Sénégalais ne sont pas dupes. Ni vous ni moi ne pouvons tromper les gens
qui sont des observateurs et suivent ce qui se passe dans le pays. Ils sont
juges. Il ne faut pas croire que les gens peuvent dire des choses et être crus
comme ça. Dire que c’est le pouvoir qui exerce la violence, c’est exprimer ce
que l’on souhaite que les gens pensent, mais ce n’est pas évident que les gens
vont gober cela.
Durant la rencontre entre le
Président Sall et le Cadre unitaire de l’islam au Sénégal, la semaine dernière,
la question d’une amnistie pour Khalifa Sall et Karim Wade a été agitée.
Etes-vous pour ou contre ?
Ce sont des sujets sur lesquels je ne souhaite pas me prononcer.
Sur la question du Premier
ministre il y a beaucoup de spéculations sur le meilleur profil à ce poste. A
un moment, Aliou Sall avait dit qu’il ne s’interdisait que le poste de
président de la République, mais n’écartait pas même un poste de Premier
ministre. Serait-ce maintenant le moment pour Aliou Sall de briguer ce
poste ?
Pour vous dire, je ne suis candidat à aucun poste nominatif. Même si on me le
proposait, je ne le prendrai pas. Ça je vous l’affirme. En ce moment, aucun
poste nominatif ne m’intéresse.
C’est drôle parce qu’à une
époque il était dit que le Président ne nommera jamais Aliou Sall. Mais on a vu
qu’il l’a fait…
Heureusement qu’il l’a fait. Moi, j’avais un défi, c’est de dire qu’il l’a dit,
mais que ce n’est pas juste. Aliou Sall est un citoyen, même si il est frère du
président de la République. J’ai droit à tout ce à quoi un citoyen à droit y
compris à être nommé. C’est révoltant qu’on me dise que tu ne vas pas avoir
accès à un poste. Ce n’est pas normal. Ne serait-ce que d’avoir été nommé
directeur de la Caisse de dépôts et de consignations, était une satisfaction
pour moi. Ce n’est pas normal qu’on dise de quelqu’un il ne doit pas être
nommé. Mais je vous affirme qu’en ce moment, ça ne m’intéresse pas d’être nommé
à quelque poste que ce soit. Et si on me le proposait, je déclinerais poliment.
En banlieue, beaucoup de jeunes
n’ont pas d’emploi. Quels leviers avez-vous mis en place pour permettre à ces
jeunes de trouver un emploi ?
La question de l’emploi est une question très difficile. L’Etat a fait beaucoup
d’efforts, en matière de promotion de l’entreprenariat, en matière de
financements de l’Emploi. Et ça a donné des résultats. Rien que la convention
Etat-employeurs permet aujourd’hui a beaucoup de Pme de recruter des jeunes qui
autrement ne seraient jamais recrutés. A notre niveau, ce que nous pouvons
faire réellement, c’est d’abord de promouvoir l’employabilité. En mettant en
place une plateforme d’information en rapport avec l’Etat, pour que les jeunes
qui veulent se former à des métiers puissent avoir l’information. Et nous avons
réussi à le faire à travers notre direction de l’Education qui a établi des
partenariats avec beaucoup d’établissements de formation.
Nous allons faire du prochain mandat, un mandat d’économie. Parce que quand
vous voulez faire une ville de service, quand vous voulez faire de Guédiawaye
un hub médical, quand vous voulez faire un pool de service pour tout ce qui est
transport, autrement dit développer l’artisanat et l’automobile, la mécanique,
la tôlerie, la peinture etc. mais aussi les métiers de l’esthétique, vous créez
un bassin d’emplois. C’est cela notre rôle. Mais nous ne pouvons pas recruter
les jeunes. Mais l’emploi des jeunes sera un axe prioritaire parce que nous
sommes entièrement sensibles à la question de la jeunesse.
Etes-vous pour un statut pour
le maire ?
C’est notre bataille. La situation de maire au Sénégal c’est inadmissible. Comment
pouvez-vous comprendre qu’un maire qui a deux mandats, trois mandats, je
connais des maires qui ont cinq mandats… Ça veut dire 25 ans voir 30 ans de sa
vie, le gars s’est consacré à sa mairie. Il termine sa carrière, il n’a pas
d’assurance maladie. Moi qui vous parle, je n’ai pas d’assurance maladie.
Pensez-vous que ça c’est normal ? Alors que je travaille pour les
populations. Je n’ai pas de retraite, pensez-vous que ça c’est normal ? Je
n’ai aucune protection juridique, c’est-à-dire que si je sors et qu’on
m’agresse, je suis traité de la même façon que tout autre citoyen, même si je
suis plus exposé qu’un ministre de la République. Donc c’est tout ça, le statut
de l’élu et du maire. Et ça c’est une bataille qu’il faut continuer à mener et
qu’il faut gagner.
Mahmout Saleh a dit, parlant de
ces Locales, qu’elles vont déterminer la question du 3ème mandat…
Moi, je ne parle pas du 3ème mandat. (Rires) Je suis interdit de parler du 3ème
mandat, je n’en discute pas, je ne donne pas mon avis…
Vous n’êtes pas nommé, vous
pouvez donner votre avis !
Non ! Il ne s’agit pas d’être élu ou nommé. Ce n’est pas par peur de
sanctions. C’est une question d’appartenance politique. Etre dans une formation
politique, c’est renoncer à une certaine liberté. Je suis dans un parti, il y a
un mot d’ordre, je le respecte. Point !