L’Ordre des architectes du Sénégal a organisé, hier, une conférence de presse pour dénoncer le manque de respect des lois qui régissent ce métier de la part de l’État. L’information est donnée par Le Quotidien dans sa parution de ce samedi.
«La préoccupation qui nous vaut d’être ici, concerne les règles qui doivent légitimement prévaloir quand il s’agit de concevoir le cadre de vie de tous les Sénégalais, parmi lesquels nous comptons tous, et de manière générale quand il s’agit de sauvegarder la noblesse, le sacerdoce et la responsabilité qui incombent à toute profession réglementée», a indiqué d’emblée Jean Augustin Carvalho, président de l’Ordre des architectes du Sénégal.
Mais d’après lui, depuis quelques années, ils ont constaté que «le métier d’architecte souffre et est sérieusement bousculé au Sénégal». À l’en croire, de multiples violations s’abattent sur la pratique de leur profession et sa réglementation.
Selon lui, «la qualité et la transparence qui en étaient recherchées au prix de la saine compétition, en prenant le soin d’organiser les concours d’architecture, gages de qualité et d’émulation de la créativité, sont malheureusement abandonnées par l’État régalien à la faveur des méthodes gré à gré pour une commande publique assidue».
Et ce qui a fait sortir les architectes de leur silence, a ajouté Jean Augustin Carvalho, c’est le projet de construction de la Tour de la Rts dont l’image de la pose de la première pierre a fait le tour du monde.
Pour le président de l’Ordre des architectes, «on ne peut s’empêcher de penser l’image d’un Sénégal si enclin à décliner ses concepts d’équité, d’égalité des chances, de contenu local et d’expertise nationale». Malheureusement, «ces proclamations», dit-il, «jurent avec ce que tout le monde a fini de constater, de vivre et de subir», à savoir la Tour de la Rts.
Aussi, on peut citer «les projets d’hôpitaux annoncés en grande pompe où l’expertise sénégalaise est une fois encore ignorée ou simplement spoliée, car ayant travaillé sur certains de ces projets des années durant, puis tout bonnement écartée un beau matin».
Et cela, dit-il, «au mépris des lois qui régissent ce pays». Ce qui amène l’architecte Ousmane Sarr à dire que le président de la République fait perdre à leur profession 200 milliards de francs par an. Un préjudice énorme sur les plans culturel et économique pour la Nation, fait-il remarquer.
Avant de déplorer le non-respect des règles du pays, des règles d’urbanisme, après les nombreux projets réalisés (26 pôles, sphères industrielles, barrages, hôpitaux, entre autres) par le Président Macky Sall depuis son accession à la tête du pays.
Mais, si les architectes ont tenu à dénoncer ces pratiques, «ce n’est pas pour chercher une faveur, mais pour exiger l’application des lois qui régissent leur profession et qui stipulent que nul ne peut porter le titre ni exercer la profession d’architecte s’il ne remplit entre autres conditions en son point 9 : être inscrit à l’Ordre des architectes et à jour de ses obligations», ont-ils fait savoir.
De l’avis du président de l’Ordre, l’État devrait promouvoir la compétitivité pour tous les projets de construction dont le financement dépasse le montant de 500 millions. En outre, ils ont dénoncé aussi le mépris dont ils font l’objet de la part de l’État. «En dix ans, jamais le président de la République n’a reçu en audience l’Ordre des architectes qui, pourtant, est en principe l’un de ses principaux conseillers en matière de construction», a révélé M. Carvalho.
Le président de l’Ordre trouve cela «inexplicable et incompréhensible», surtout dans un pays en construction. Les architectes n’ont pas omis de dénoncer cette concurrence déloyale dont ils font aussi l’objet dans l’exercice de leur profession infestée, disent-ils, par «des faussaires qui officient et portent illégalement le titre d’architectes sans être poursuivis, jugés ou condamnés à la hauteur du délit et des dangers qui en découlent».
Selon les révélations de M. Carvalho, seules 7% des constructions au Sénégal sont faites par les architectes régulièrement inscrits et en droit d’exercer. Et «pas moins de 90% des retombées économiques dont auraient dû bénéficier les services de l’État dans notre secteur, se perdent entre les non-architectes fonctionnant dans l’informel et cette vague d’étrangers architectes ou pas qui exercent en toute illégalité », dénonce-t-il en outre.