Le monde de la mode a perdu ce dimanche, en pleine «Fashion Week» parisienne, une de ses légendes. Le Japonais Kenzo est décédé, à 81 ans, des suites du Covid-19, après une longue carrière en France où il a imposé son style graphique et floral. 

Kenzo Takada était le premier styliste japonais à s’être imposé à Paris, où il a fait toute sa carrière et a rendu célèbre son prénom. Lui qui avait vendu en 1993 sa marque de vêtements au géant LVMH et s’était retiré de la mode six ans plus tard restera connu pour son attachement à la couleur et sa déclinaison à l’infini du métissage, pas seulement de l’Extrême-Orient et de la France, mais aussi de l’Afrique.

Look d’éternel adolescent

Gardant son look d’éternel adolescent, le créateur était sorti d’une retraite de vingt ans, en début d’année, pour lancer une ligne de design. Il « s’est éteint le dimanche 4 octobre 2020 à l’Hôpital américain de Neuilly-sur-Seine des suites du Covid-19 », a indiqué un porte-parole, dans un communiqué dimanche, alors que se tient la Semaine de la mode parisienne. Né le 27 février 1939 à Himeji près d’Osaka, Kenzo Takada se passionne pour le dessin et pour la couture, enseignée à ses sœurs, mais interdite aux garçons. Chassé de son appartement de Tokyo par les Jeux olympiques après ses études de stylisme, il embarque à Yokohama sur un paquebot en novembre 1964.

Il arrive en France le 1er janvier 1965, dans le port de Marseille, et monte vers Paris, qui le fascine. Vivant très chichement, et ayant les pires difficultés à communiquer, Kenzo Takada pense n’être que de passage. « Je trouvais tout sombre. Même Saint-Germain-des-Prés », raconte-t-il au quotidien Libération en 1999. Il s’obstine, soumettant ses dessins à des couturiers et des marques de prêt-à-porter. Et il s’installe définitivement en France. « Je me sens désormais plus Parisien que Japonais, mais si c’était à refaire aujourd’hui, je ne suis pas sûr que je viendrais encore faire ma vie à Paris », disait-il à Paris Match en 1989.

« Profiter de la vie »

Sa première collection date de 1970, conçue depuis une miniscule boutique de la Galerie Vivienne qu’il appelle Jungle Jap. Il déménage en 1976 vers un lieu plus grand, place des Victoires, et fonde sa marque sous son seul prénom. Sa première ligne pour hommes date de 1983, son premier parfum (Kenzo Kenzo) de 1988. Cinq ans plus tard, la griffe est rachetée par le groupe de luxe LVMH, pour moins d’un demi-milliard de francs (73 millions d’euros). Kenzo Takada quitte la mode en 1999, pour en finir avec le rythme infernal des collections et se consacrer des projets plus ponctuels. « J’ai 60 ans et 30 ans de carrière. Depuis longtemps je voulais profiter de la vie, voyager, voir des amis », explique-t-il alors à l’AFP.

Le dernier de ces projets s’appelait K-3, marque de design lancée en janvier. « Kenzo Takada était d’une incroyable créativité; d’un trait de crayon, d’un geste vif, il inventait une nouvelle fable artistique, une nouvelle épopée colorée mariant Orient et Occident, son Japon natal et sa vie parisienne », a affirmé le directeur général de cette société, Jonathan Bouchet Manheim. Avec ses « près de huit mille dessins », le créateur japonais « n’a jamais cessé de célébrer la mode et l’art de vivre », a indiqué son porte-parole. « Créateur avec un talent immense, il avait donné à la couleur et à la lumière toute leur place dans la mode. Paris pleure aujourd’hui un de ses fils », a réagi sur Twitter la maire de la capitale française Anne Hidalgo.