Le ministre de l’Urbanisme du Logement et de l’Hygiène publique, Abdou Karim Fofana, se prononce, dans cet entretien, entre autres sujets, sur le décret qu’il a signé et qui autorise la commune de Yoff à procéder au lotissement des titres fonciers N°2130/NGA, 5948/NGA, 213/NGA et 5942/NGA.
«La coopérative de l’Anacim n’avait pas parlé de dépeçage en 2009»
«Il est dommage qu’un langage aussi dégradant soit utilisé, dans l’affaire des 557 terrains de l’Aéroport Léopold Sedar Senghor, pour qualifier le travail de l’Administration et surtout accuser gratuitement des personnes sans fondement. La zone a fait l’objet d’un lotissement en bonne et due forme et l’espace est principalement réservé aux recasements des sinistrés de Tobago et à des citoyens sénégalais connus ou inconnus qui en font la demande», a déclaré Abdou Karim Fofana. Qui ajoute : «Pourtant, cette même Coopérative de l’Anacim avait déjà reçu, selon les Domaines, de nombreuses parcelles dans cette même zone en 2009, lors d’un précédent lotissement et elle n’avait pas parlé de dépeçage. Nous avons tous les chiffres et les noms des affectataires. Il y aussi une autre demande en cours de traitement pour la même Coopérative vers l’Aéroport International Blaise Diagne de Diass». Le ministre de l’Urbanisme du Logement et de l’Hygiène publique de marteler : «Je veillerai, personnellement, à ce que les mêmes Coopératives ne puissent pas bénéficier à l’infini de parcelles, sans justifier de l’usage qu’ils ont fait des attributions précédentes. Avec moi, la pression ou le chantage ne marchent pas. Si elles ont une demande particulière, elles n’ont qu’à la formuler avec courtoisie en bonne et due forme à l’autorité compétente pour affecter des parcelles. Mon rôle avec l’urbanisme se limite à vérifier la conformité du projet de lotissement avec le code comme indiqué plus haut. C’est tout».
«Le nouveau décret du chef de l’État répond aux nécessités de notre époque»
«Ce décret vient répondre aux nécessités de notre époque en matière de gestion foncière. Il y a eu beaucoup de débats ces derniers mois sur l’affectation du foncier rural à des promoteurs d’agrobusiness, notamment dans ce qu’il est convenu d’appeler l’affaire Ndingler. Et le président de la République a jugé nécessaire de renforcer le contrôle et la rationalisation de l’approbation des délibérations des conseils municipaux en matière foncière. En réalité, rien n’a changé dans le pouvoir des maires et de leurs conseils municipaux. C’est l’État qui a changé ses modalités de contrôle de légalité au niveau local avec la stratification de la décision d’approbation des délibérations portant affectation des terres du domaine national», indique Abdou Karim Fofana dans les colonnes du journal Source A.
«Les Conseils municipaux gardent intacts leur pouvoir de délibération»
Et de poursuivre : «Les maires et leurs Conseils municipaux gardent intacts leur pouvoir de délibération. Cependant, l’État qui a toujours le contrôle sur les actes des collectivités territoriales a décidé de réorganiser les modalités d’approbation en fonction de l’importance des surfaces concernées. C’est ce que nous a révélé l’affaire Ndingler. On pouvait affecter des centaines d’hectares par délibération communale à un promoteur sans que le préfet ou le gouverneur en connaisse, encore moins les ministres. C’est pourquoi les niveaux d’approbation ont été aménagés en fonction des superficies en jeu : en dessous de 10 hectares le sous-préfet ; entre 10 et 50 hectares le préfet de département ; au-delà de 50 hectares, c’est le gouverneur de région avec obligation de faire numéroter au Secrétariat général du Gouvernement afin que l’information soit reçue au niveau central avant que la délibération ne soit exécutoire. Donc, ce n’est pas une volonté de réduire le pouvoir des maires, mais celui de renforcer le contrôle par l’État des actes d’affectation des communes pour rationaliser et éviter les conflits inutiles.
«Le ministère de l’Urbanisme n’affecte pas de terres sauf pour les ZAC»
«Un bon travail a été fait dans le cadre de la Commission nationale sur la réforme foncière par les spécialistes et les acteurs qui évoluent dans le secteur. Après cela, il appartient à l’État d’apprécier l’opportunité de la mise en œuvre desdites recommandations. Les acteurs ont une compréhension différente des actes administratifs relatifs au foncier. Souvent le ministère de l’Urbanisme est cité dans des affaires foncières sans que les uns et les autres ne sachent son rôle dans ce domaine. Le ministère de l’Urbanisme n’a pas de pouvoir d’affectation de terres sauf pour les ZAC (Zone d’aménagement concerté) et les Pôles urbains où il peut initier le processus d’affectation ou donner son avis conforme au service des Domaines pour affectation. Pour le cas des ZAC, c’est un dispositif qui permet d’octroyer des parcelles viabilisées et aménagées à des citoyens ou des promoteurs moyennant une cotisation pour éviter toute marge commerciale ou spéculation. Vous cotisez sur les frais d’aménagement ou de viabilisation qui permettent d’équiper le site en voirie, réseaux primaires, eau, électricité et assainissement», informe le ministre.
«L’Urbanisme travaille avec Ageroute, Onas, Sones, Sonatel, Cadastre, Domaines…»
Abdou Karim Fofana d’enchaîner : «Souvent, il est perçu dans l’opinion que le ministre de l’Urbanisme a le pouvoir d’affectation alors qu’en réalité l’autorisation de lotir ne signifie pas affectation ou autorisation d’occupation. L’autorisation de lotir permet d’organiser l’occupation de l’espace des communes et de minimiser la prolifération de quartiers irréguliers. Il doit se faire dans des zones disposant de plans d’urbanisme approuvés. À défaut de l’existence de ces plans ; le lotissement est soumis à la délibération du comité régional d’urbanisme territorialement compètent et présidé par le gouverneur. Cette procédure permet de vérifier la conformité du plan de morcellement d’une assiette foncière réalisé par une commune si c’est un TNI ou tout autre propriétaire (État, particuliers, collectivités, entreprises…). En d’autres termes, le rôle de l’urbanisme est de vérifier la conformité technique et règlementaire en termes de largeur des routes, superficie minimale des parcelles, le ratio d’aménagement entre la voirie, les équipements collectifs, les zones résidentielles, les zones non aedificandi et autres réseaux divers. Suivant le Code de l’urbanisme qui guide notre action de tous les jours, la parcelle minimale autorisée est de 150 m2, la largeur minimale des routes doit être de 10 mètres, 15% de la superficie d’un lotissement doivent être réservées à la voirie et 15 % aux équipements (école, mosquée, espace vert, terrain de foot, marché, etc.). Il faut noter que l’Urbanisme ne décide pas seul. Chaque lotissement doit faire l’objet d’une instruction administrative et technique conduite par les services de l’urbanisme vers les autres services de l’État (Ageroute, Onas, Sones, Sonatel, Environnement, Cadastre, Domaines, etc)».