Selon une enquête OpinionWay commandée par le Conseil présidentiel pour l’Afrique, 73 % des sondés affirment que l’égalité des chances n’est pas respectée.
Sonder les attentes et les ressentis des « Français issus de la diaspora africaine ». L’exercice est assez inédit, selon Wilfrid Lauriano do Rego, coordonnateur du Conseil présidentiel pour l’Afrique (CPA). Cette structure, créée en 2017 par Emmanuel Macron pour nourrir sa politique africaine et donner plus de place aux sociétés civiles, a diligenté l’institut OpinionWay pour mener une telle enquête, dont les résultats ont été révélés mercredi 3 février. « A ma connaissance, on a rarement fait un sondage où on les interroge sur ce qui est important pour eux », indique Wilfrid Lauriano do Rego.
Attachement aux valeurs républicaines
Parmi les mille Français issus de la diaspora africaine interrogés, un constat, préoccupant, se dégage : 73 % d’entre eux pensent que « l’intégration des personnes d’origine étrangère dans la société française fonctionne mal ». L’égalité des chances n’est pas respectée pour « les personnes d’origine étrangère », estiment les trois quarts des sondés, et 62 % regrettent que l’ascenseur social ne fonctionne pas pour elles. Questionnés sur les « solutions » susceptibles de répondre à ces « points de blocage », 81 % désignent « l’éducation » comme « le moyen le plus efficace pour intégrer les personnes d’origine étrangère ».
Pour autant, même si 55 % des sondés assurent avoir été entravés dans leur parcours scolaire ou leur vie professionnelle du fait de leurs origines, ils sont aussi plus de la moitié (54 %) à se dire satisfaits de la position qu’ils occupent aujourd’hui dans la société. « Ils n’ont pas le sentiment d’être perdus, ils trouvent leur place. Malgré les difficultés, ils avancent et existent dans la société », note Bruno Jeanbart, vice-président d’OpinionWay.
Pour Wilfrid Lauriano do Rego, ce sondage a le mérite de mettre en lumière un « malaise ». « Il est là, on ne l’a pas inventé », répète-t-il. Le coordonnateur du CPA dit avoir lui-même saisi à quel point ce « malaise » était prégnant dans la société en allant, ces derniers mois, à la rencontre d’entrepreneurs issus de la diaspora africaine à travers la France. « Avec ce sondage, le diagnostic est posé, mais je le vois aussi comme une invitation au vivre-ensemble et à l’action », explique-t-il.
«Dire à la jeunesse que c’est possible»
De fait, l’enquête démontre aussi l’attachement sans équivoque de cette diaspora aux valeurs républicaines. Des principes que ces Français souhaiteraient voir davantage respectés pour eux-mêmes, en se voyant accorder plus de place dans les différents secteurs de la société. A 80 %, ils assurent que la diaspora d’origine africaine est aujourd’hui mal représentée dans l’espace public, parmi les élus ou dans les médias. Parmi les enjeux qui leur semblent les plus importants en France, ils classent ainsi en tête la question des inégalités (49 %), devant l’éducation (41 %) et l’emploi (40 %).
Concernant les relations entre ces Français issus de la diaspora africaine et leurs pays d’origine, cette enquête d’opinion va à l’encontre de certaines idées reçues : 54 % des sondés disent « ne pas appartenir à cette diaspora ». Parmi cet échantillon, ce sentiment est plus marqué chez les Français d’origine maghrébine (59 %) ; en revanche il est nettement moindre chez les Subsahariens d’origine (38 %). En outre, les trois quarts des sondés déclarent ne pas envoyer d’argent au continent : ils sont 81 % chez les personnes d’Afrique du Nord et 57 % pour les Subsahariens.
« On s’aperçoit que les liens avec le pays d’origine sont plus distendus que ce que l’on imagine. La dimension communautaire est moins marquée, souligne Bruno Jeanbart. L’origine à laquelle on tient n’est pas une notion qui supplante le fait d’être Français. » Sans surprise, une majorité des sondés (52 %) affirment ainsi que la politique de la France vis-à-vis de l’Afrique n’a pas d’impact sur leur vie. En même temps, sur le plan économique, 83 % pensent que l’Afrique est une chance pour la France et 71 % se disent prêts à s’engager dans un projet avec leur pays d’origine, et ce davantage dans le domaine associatif que professionnel.
(Source : Le Monde)