Lors du dernier Conseil des ministres tenu ce mercredi 22 mars 2023, le président de la République a demandé au gouvernement de « prendre toutes les mesures idoines pour assurer sur l’étendue du territoire national la sécurisation absolue des personnes et des biens, au regard de certains troubles à l’ordre public observés ces derniers jours dans des localités du pays.» 

Le message qu’il envoie est on ne peut plus clair. Il n’entend aucunement accorder une quelconque attention au cri de cœur du peuple, lancé différemment, selon les moyens d’expression limités qui lui sont offerts.

Que la force publique et la lubie du chef s’imposent, peu importe les motivations des manifestants, considérés comme de simples râleurs capricieux qu’il faut mater sans concession, semble être la substance de cet avertissement belliqueux. Il est clair que notre nouveau monarque est éperdument enivré par les effluves trompeurs d’un pouvoir que le peuple lui a confié et qu’il considère dorénavant comme son royaume.

Au prix de ce que cela coûtera en vies enlevées, en libertés confisquées et en violences exercées, Macky Sall est prêt à faire sauter tous les verrous de ce qui nous restait encore minimalement d’un simulacre de démocratie. Nous savions que son désir de se maintenir au pouvoir est quasi irrationnel malgré toute la gymnastique rhétorique qu’il nous sert depuis quelques années autour de sa candidature.

Nous doutions, toutefois, qu’il aille aussi loin pour assouvir une telle obsession dans un pays comme le Sénégal qui a quand même connu de belles victoires dans certains acquis démocratiques même si des cycles temporaires de vives agitations politiques l’ont parfois traversé. Cependant, pour Senghor, Diouf et Wade, la raison finissait toujours par prendre le dessus sur les bas calculs partisans et l’accalmie succédait aux soubresauts de l’espace politique. 

Pour poursuivre ses folies autocratiques et imposer sa volonté de gouverner indéfiniment les Sénégalais, le président Macky Sall, avec la complicité d’un recours abusive à la force publique et l’allégeance d’une justice couchée, est prêt à ramener les Sénégalais 60 ans en arrière.

Replonger progressivement les Sénégalais dans un univers sociopolitique empreint de peur, de clandestinité, de délation et de contrôle excessif des libertés individuelles semble être sa nouvelle stratégie démoniaque de gestion des contestations populaires. Il ne compte lésiner sur aucun moyen répressif pour assujettir sa population qu’il compte transformer en sujets docilement asservis. 

Il est clair que l’homme ne s’est jamais accommodé des principes élémentaires de la démocratie qu’il a toujours foulés allégrement aux pieds. Sa conception du pouvoir n’a certes jamais varié depuis le premier jour où s’est installé sur le fauteuil présidentiel, mais nous croyions naïvement qu’il se fixerait une ligne rouge qu’il ne franchirait jamais dans l’adversité politique, à l’instar de ses prédécesseurs.

Nous nous sommes trompés lourdement. 400 prisonniers politiques qui se retrouvent, du jour au lendemain, derrière les barreaux pour des raisons aussi fallacieuses que ridicules, cela reste un si triste record que même Senghor, au plus fort de sa gestion hégémonique du pouvoir, marqué par le parti unique, n’a jamais battu. 

La longue marche vers l’atteinte de l’idéal démocratique est un processus sans fin, qui appelle constamment à des remises en question parfois déchirantes et à des améliorations constantes.

Même dans les pays dits de grande démocratie, l’on veille constamment à sa sauvegarde par des mécanismes de contrôle institutionnels et à travers une veille permanente des citoyens afin d’éviter toute dérive liberticide des tenants du pouvoir. C’est parce qu’elle se construit difficilement dans la durée, très souvent aux prix de multiples sacrifices, que les acquis démocratiques sont jalousement protégés.

Malheureusement, lorsque le pouvoir se retrouve accidentellement entre les mains d’un individu sans grande culture historique, dépourvu de valeur morale sur le respect de l’humain et égoïstement centré sur ses pulsions narcissiques, il va sans aucun doute en abuser et en faire un objet de coercition violent pour mater toute voix discordante.

Les livres d’histoire regorgent de ces sinistres personnages politiques qui ont usé abusivement de méthodes répressives inhumaines pour se maintenir à tête d’un pouvoir qu’il croyait éternel.

Mais, il est tout aussi rassurant de se rappeler que, dans l’histoire du monde, les plus grands mouvements de résistance ont vu le jour dans les périodes les plus sombres de la vie politique des nations. Un groupe d’hommes et des femmes que rien ni personne ne peut soumettre ont toujours su RESTER DEBOUT pour réclamer fièrement, au prix de leur vie, leur droit inaliénable à la liberté.

Ce rêve fou du président Macky Sall de voir un Sénégal fait de renoncements, d’omerta et de frayeur, avec des Sénégalais agenouillés devant sa volonté, ne se réalisera jamais. L’histoire du Sénégal n’a pas démarré en 2012 et elle survivra indéniablement, et de fort belle manière, après sa chute prochaine. Une question de mois…